Il y a des joueurs qui, par leur seule présence, modifient l'atmosphère des parties qu'ils disputent. Eric Bartoli est de ceux-là.
Bartoli, le Prince noir de Borély
Il y a des joueurs qui, par leur seule présence, modifient l'atmosphère des parties qu'ils disputent. Plus que leur palmarès ou leurs grandes victoires, c'est leur aura et leur personnalité qui marque l'esprit de ceux qui les voient jouer. Eric Bartoli est, incontestablement, de ceux-là.
Très jeune, le grand joueur marseillais marque déjà de sa présence les grands concours du Sud, en compagnie d'autres grands espoirs phocéens. Ainsi de ce quart de finale du Mondial la Marseillaise disputé en 1986 face à Salvador, Passo et Capeau en compagnie d'Aimé Courtois et de Ceccoli : les jeunes gens vont tirer systématiquement le bouchon dès la première boule de retard et annuler un grand nombre de fois, avant de s'incliner avec panache à l'issue d'une partie marathon. En 1988, c'est une victoire aux Trois Jours de Saint Pierre où Bartoli et Adamo Kerbadou, en compagnie de Baldacchino, vont révéler toute leur classe naissante.
Mais c'est avec Gérard Garagnon, autre révélation marseillaise, que Bartoli va entamer les années 90. Cette doublette de légende, quart de finaliste du championnat de France doublettes en 1991, va être l'une des sensations de tous les grands concours de l'Hexagone. Et notamment de Millau, où elle ne s'inclinera qu'en finale en 1990 face à Fazzino et Voisin. Les deux Marseillais seront également demi-finalistes la même année en triplettes avec Xeron, et quart de finalistes l'année suivante en compagnie de Santiago.
Bartoli est lancé. Chacun le considère à présent comme l'un des tous meilleurs tireurs français, Marseille l'adule. Mais 1992 sera une année noire : alors que se dispute un quart de finale du championnat de France tête-à-tête entre le tenant du titre, David Le Dantec, et Éric Bartoli, un incident éclate sur un jeu voisin. Dans le quart de finale du championnat de France doublettes qui oppose Adamo et Bocognani à Jean-Luc Robert et Laurent Morillon, l'arbitre annule l'une des boules d'Adamo. En réponse, l'équipe des Bouches-du-Rhône et son délégué décident de quitter la compétition. Par solidarité, Bartoli fait de même, renonçant ainsi à l'une de ses plus grandes chances de conquérir le titre.
Quinze jours plus tard, il est en demi-finale de la Marseillaise avec Garagnon et Morillon. Les trois hommes ont fait un parcours étincelant, qui les a érigés en super-favoris de la compétition. Face à Deluy, Faure et au grand-père de Tyson, Louis Molinas, ils vont trébucher sur un tir malencontreux de Bartoli et laisser la victoire à leurs adversaires. Le Mondial la Marseillaise, qui ne sourira jamais à son joueur le plus étincelant, vient d'infliger sa première déception au Prince de Borély. Il y en aura d'autres. Et notamment cette autre demi-finale face à Bruno Castellan et Daniel Hernandez, cinq ans plus tard au stade de l'Huveaune : associé à Santiago et Tamboura, Bartoli mène 12-0. Après une fin de partie phénoménale de Castellan, il va s'incliner 13-12. Deux quart de finale, trois demi-finale, le concours géant, rêve de tous les Marseillais, ne se donnera jamais à Éric Bartoli.
Photo journal La Marseillaise
Au cours des années 2000, on le voit beaucoup moins sur le circuit. Mais ses rares sorties continuent à marquer les esprits : demi-finaliste de l'Europétanque en 2002 avec Modeste et Puccinelli, finaliste en 2004 avec Hernandez et Puccinelli, il continue à aimanter les caméras de télévision. Jusqu'en 2008, où il intègre la wild-card donnée par les Masters de pétanque avec Foyot, Passo et Bettoni. Cette équipe de grosses personnalités va s'imposer en finale face à la Dream Team de Lacroix, Suchaud, Quintais et Perrin, et écrire une nouvelle page de la légende du grand champion du Sud.
Joueur plein de panache et de talent, champion capable de moyennes énormes, mental et présence monumentales, Éric Bartoli s'est posé, tout au long de sa carrière, comme l'héritier de la grande lignée des champions marseillais des années 50, 60 et 70, de ces princes de la raille qui ont écrit les pittoresques pages de la pétanque d'après-guerre. A l'heure où la pétanque finit de conquérir l'ensemble de la planète et devient plus intérieure et plus lisse, il reste, par sa gouaille, sa personnalité et son sens du spectacle, l'un des derniers champions 100% provençaux. Et rêve encore, en secret, de quelques beaux parcours au parc Borély...
2013
L'entretien du mois : Eric Bartoli, une légende marseillaise
Son Portrait
Eric BARTOLI
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